Saint-Pierre: Ah, une nouvelle âme se présente aux portes éternelles du Paradis. Permettez-moi de consulter votre dossier sur mon ordinateur céleste. Ah, voilà, je vois que vous avez quitté le monde des vivants à cause d’une défaillance hépatique. Un organe si vital, si souvent négligé. Vous avez d’abord ressenti une légère inconfortabilité, une douleur subtile, presque insaisissable, n’est-ce pas ?

Le Malade: Ouais, c’est ça. Une petite gêne, comme une mouche qui te tourne autour, tu vois ? Mais bon, j’ai pas fait grand cas de ce petit bobo. J’ai continué à lever le coude, à trinquer à la vie, à la mort.
Saint-Pierre: Ah, l’insouciance humaine, ce doux poison qui nous fait ignorer les signaux d’alarme de notre propre corps. Je vois ici que la fatigue et le malaise général ont suivi. Des symptômes qui auraient dû vous alerter, vous inciter à prendre soin de vous-même.
Le Malade: Ouais, j’étais tout le temps crevé. Mais je me disais que c’était le boulot, le stress, la vie, quoi. J’ai pas pensé que mon foie me faisait des signaux de détresse.
Saint-Pierre: Ensuite, le jaunissement de la peau et des yeux, l’ictère, a fait son apparition. Un signe manifeste que votre foie ne parvenait plus à filtrer les toxines de votre corps.
Le Malade: Ouais, j’ai vu que j’avais la peau un peu jaune, mais je me suis dit que c’était peut-être le reflet du soleil ou je ne sais quoi. J’ai continué à boire, à faire la fête.
Saint-Pierre: Ah, la déraison ! Elle nous pousse à ignorer même les signaux les plus évidents. Votre dossier indique que les douleurs abdominales sont devenues intenses, presque insupportables. Vous avez perdu l’appétit, les nausées ont commencé à vous tourmenter.
Le Malade: Ouais, c’était la cata. J’avais mal tout le temps, je pouvais plus manger, et même le vin me donnait envie de vomir. C’était comme si mon corps me disait : « Hé, gros malin, tu vois où ça mène de faire le con ? »
Saint-Pierre: Et pourtant, même face à l’ascite, cette accumulation de liquide dans l’abdomen, vous n’avez pas cherché d’aide médicale. Vous avez persisté dans votre voie, jusqu’à l’encéphalopathie hépatique, ces troubles du comportement et cette confusion mentale.
Le Malade: J’étais complètement à l’ouest, c’est sûr. J’ai même cru que j’étais Napoléon à un moment donné. J’étais perdu, mais je me disais que ça passerait, que c’était juste une mauvaise passe.
Saint-Pierre: Finalement, l’insuffisance hépatique aiguë a précipité votre âme jusqu’à ces portes. Le coma hépatique a été votre dernier séjour sur Terre. Vous avez choisi de danser avec la mort, et elle vous a pris dans ses bras.
Le Malade: Ouais, j’ai fait un gros dodo et me voilà ici. Alors, je rentre ou pas ?
Saint-Pierre: Votre dossier est pour le moins… complexe. Le Paradis est certes un lieu de rédemption, mais il est également un lieu d’apprentissage et de croissance. Seriez-vous prêt à accepter une condition pour votre entrée ?
Le Malade: Une condition ? Bon, vas-y, je t’écoute.
Saint-Pierre: Vous serez le bienvenu au Paradis, mais à une condition : vous devrez servir d’ange gardien pour d’autres âmes en détresse, des malades alcooliques qui sont encore en vie. Vous les guiderez, les protégerez et les aiderez à prendre les bonnes décisions pour éviter le triste sort qui a été le vôtre.
Le Malade: Ah, c’est une drôle de mission, ça ! Mais si ça peut éviter à d’autres de finir comme moi, pourquoi pas ?
Saint-Pierre: Très bien, mon fils. Votre rôle sera crucial, car vous connaissez mieux que quiconque les pièges et les tentations qui guettent ces âmes vulnérables. Entrez donc, et que cette éternité soit pour vous une leçon d’humilité et de modération, mais aussi une opportunité de rédemption et de service.
Le Malade: Merci, Saint-Pierre ! Allez, à la tienne ! Et à la leur, à tous ces pauvres bougres que je vais devoir aider !
Saint-Pierre: En effet, à la tienne et à la leur. Que votre nouvelle vie éternelle soit riche de sens et de bienveillance.